« Je suis passé de 150 à 50 truies et j’ai augmenté mon revenu » Pascal Aubry éleveur de porcs en Mayenne
Gilles Cavalli : Bonjour et bienvenu dans ce nouveau podcast d’Agrifind. Aujourd’hui j’interview Pascal Aubry qui est agriculteur céréalier et éleveur de porcs dans la Mayenne. Bonjour Pascal.
Pascal Aubry : Bonjour. Oui je suis éleveur de porc depuis 1990, avec une formation en BEP. J’élevais 150 truies jusqu’à il y a deux ans. Là, je suis redescendu à 50 suite à la crise et des pertes financières énormes. J’ai recalibré tout mon élevage pour être autonome (en alimentation) et (commercialise) une grande partie en vente directe, je pratique déjà depuis 2007 la vente directe à des bouchers charcutiers.
Gilles Cavalli : Très bien. Peut-être nous reprécisez un petit peu les contours de l’exploitation, les surfaces, les connexions entre la partie grande culture et la partie élevage.
Pascal Aubry : Aujourd’hui et depuis 1990, je suis sur une surface de 36 hectares de SAU, et qui est 100% labourable malgré que je ne le fasse pas et cultivée principalement en céréales, blé, orge pois, et aussi culture de tournesols, la seule culture que je vends, tout le reste cela passe dans la nourriture des cochons.
Gilles Cavalli : Une SAU de petite dimension, principalement pour nourrir l’atelier porc – excepté pour le tournesol – et donc par le passé 150 truies et aujourd’hui 50 donc divisé par 3. Quelle était l’origine de ce choix de diminution drastique des effectifs ?
Pascal Aubry : J’ai fait cela parce que je perdais énormément d’argent, le pire a été 2007 et 2008 où là j’ai perdu plus de 200 000 euros sur les deux années et cela n’était plus tenable, il fallait vraiment faire quelque chose. Alors dans un premier temps, j’ai gardé les 150 truies mais je n’engraissais plus que 500 porcs que je vendais en direct à des bouchers charcutiers. Le reste je vendais en porcelet de 25 kilos en direct à un éleveur engraisseur du Finistère. Mais cela m’a juste permis d’équilibrer mais pas de boucher les trous donc il a fallu encore réfléchir et puis en réfléchissant, en prenant l’exemple d’un voisin qui a arrêté pour retraite il y a une quinzaine d’années qui avait en gros 45 truies sur à peu près la même surface que moi, je me suis posé la question de savoir comment il pouvait faire et en réfléchissant bien c’est parce qu’il était autonome et j’ai pris ma calculatrice pour savoir – en faisant 10 truies par 10 truies – quel était l’optimum pour arriver à gagner de l’argent et pour moi l’optimum chez moi c’était 55 truies.
« Je suis éleveur de porcs, je les engraisse et les vends directement aux bouchers charcutiers »
Gilles Cavalli : Donc c’est ce calcul en terme d’autonomie d’alimentation et par rapport aux débouchés, la transformation comment cela s’est mis en place ?
Pascal Aubry : Je ne fais pas de transformation je vends directement à des bouchers charcutiers, c’est un prix livré abattoir. Le boucher charcutier va chercher la carcasse à l’abattoir donc, dans un premier temps, cela a été d’aller voir les bouchers charcutiers avec une demi-carcasse sur le dos et puis leur faire essayer. Et puis cela a été aussi de travailler la qualité de la viande avec un formulateur indépendant. Cela a duré 4 à 5 ans pour arriver à avoir les carcasses qu’on obtient aujourd’hui. On arrive à des carcasses d’une qualité gustative bien supérieure celle d’un porc standard, bien que je n’aie rien contre le porc standard, ce qui nous permet de bien valoriser et surtout de garder des clients.
Gilles Cavalli : Si on veut refaire un petit peu le film très rapidement, la transition entre 200 000 euros de perte en deux ans avec 150 truies et 50-55 truies avec un résultat net positif avec le fait de démarcher les bouchers charcutiers et le fait d’avoir une bonne formulation pour l’alimentation et d’assurer l’autonomie alimentaire. Cette transition vous a pris combien de temps ?
Pascal Aubry : En tout, on va dire, j’ai démarré en 2007 avec des bouchers charcutiers. Apres en 2010 j’ai arrêté de tout engraisser. En 2015, j’ai réduit à 55 truies et puis aujourd’hui je suis à 55 truies et je valorise, on va dire, en gros, à 50-60% par des bouchers charcutiers, le reste en circuit traditionnel mais cela va encore évoluer plus vers du boucher charcutier.
Gilles Cavalli : Et bien merci de ce retour d’expérience. On voit que le processus a pris quelques années. Aujourd’hui vous diriez que le système, d’un point de vue de production, il est stable et c’est encore sur l’aspect commercialisation qu’il y a des marges de manœuvre et des gains à avoir ?
Pascal Aubry : Oui, il y a encore des marges de manœuvre sur l’aspect commercialisation mais sur la production je pense qu’on est à l’optimum. On n’arrivera guère à faire mieux, mis à part reprendre de la surface mais ce n’est pas facile dans notre secteur et puis financièrement je n’ai pas la capacité d’acheter de la terre.
Gilles Cavalli : Merci beaucoup pour ce témoignage. Une dernière question : votre rêve d’agriculteur, quel est-il ?
Pascal Aubry : Mon rêve d’agriculteur, on va dire que ce serait que tous les agriculteurs gagnent leur vie et pas la misère que l’on connait aujourd’hui.
Gilles Cavalli : Cela parait quelque chose de tout à fait légitime. Effectivement, que chacun puisse vivre de son métier et gagner correctement sa vie surtout quand on est à la base de l’alimentation qui nous nourrit tous. Merci beaucoup Pascal Aubry pour cet échange. C’est la fin de cette interview, de ce nouveau podcast d’Agrifind. Je vous souhaite une excellente journée à tous et à très bientôt pour une nouvelle interview d’un éleveur. Au revoir
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Crédit photo CC : raz1940 et Charlotte
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