La blockchain en agriculture : quel avenir ?
Blockchain : un terme qui revient fréquemment lors des échanges sur l’AgTech et l’avenir de l’agriculture connectée. Cette technologie date de 2009 et voit des applications concrètes arrivées dans le monde agricole et agro-alimentaire. Explication et petite revue d’effectif en 4 points.
1) Traçabilité d’une transaction de manière incorruptible sans intermédiaire et rapide sont les 3 principaux bénéfices de la blockchain
La blockchain permet de réaliser des transactions entre plusieurs acteurs, en garantissant l’anonymat et la certification absolue de l’intégralité des échanges, sans aucune intervention d’un tiers de confiance. Cette technologie, décentralisée, empêche par son principe même l’instauration d’un contrôle supérieur et centralisé. Elle est fondée sur la preuve et peut être regardée comme un aboutissement du processus de désintermédiation au coeur de l’ubérisation.
Une transaction met environ 10 minutes à être inscrite à de multiple endroit de manière identique dans le système décentralisé. Ce type d’opération (les enregistrement de transaction) s’appelle du « minage » qui n’est ni plus ni moins qu’une preuve de travail utilisée comme méthode de validation des transactions mise en oeuvre par la blockchain.
2) La blockchain est un mode d’enregistrement informatique performant
La définition de « blockchain » donné par le dictionnaire libre et gratuit Wiktionnaire est :« Mode d’enregistrement de données produites sous forme de blocs liés les uns aux autres dans l’ordre chronologique de leur validation, chacun des blocs et leur séquence étant protégés contre toute modification. »
Dit autrement, c’est une sorte de grand livre d’enregistrement dans lequel toutes les transactions sont écrites mais également partagées, de telle sorte que l’information y est ainsi transparente et sécurisée.
3) La blockchain s’appuit sur des blocks
Chaque transaction constitue un bloc, s’ajoutant à la chaîne historique, elle même issue d’un premier block (genesis block ou bloc originel). Il y a ainsi structurellement un lien à la première transaction et l’aspect distribué fait que chaque nouvelle transaction doit être vérifiée par rapport à l’ensemble de la chaîne. Cette structure fait de la blockchain un système de données facile à partager, où toutes les parties prenantes peuvent en contrôler l’état et très difficile à modifier frauduleusement.
C’est l’identifiant crypté unique et immuable dénommé « hash » (rien à voir avec le cannabis) qui atteste de la validité du bloc dans lequel il est inscrit. En français, on parle de fonction de hachage. Ainsi chaque bloc modifié voit sont hash modifié et devient ainsi unique tout en contenant une trace du bloc précédent.
Focus 1 : Quel est le lien entre Bitcoin est la blockchain ?
Le lien est double. Bitcoin est la première blockchain mise au point en 2009. Et la confusion peut venir du fait que la cryto-monnaie bitcoin utilise une blockchain permettant son existence et son fonctionnement appelée : Bitcoin.
Le terme « crypto » est un faux-anglicisme signifiant simplement « chiffré », rien à voir avec les crypte !
Focus 2 : Ethereum et Ether : qu’est ce que c’est ?
L‘Ethereum est une blockchain, créée en 2015, considérée comme le « premier véritable ordinateur global», qui permet de construire sur sa plateforme des applications décentralisées ou « Dapps ».
L’Ether est le « fuel » de l’Ethereum, sa cryto-monnaie, ses données, qui contrairement au bitcoin, ne sont pas forcement de l’argent mais peuvent être d’autre nature comme un contrat par exemple.
4) 2 cas d’usage dans l’agricole et l’agro-alimentaire
La blockchain apporte des avantages à tous les acteurs de la supply chain alimentaire. Pour les agriculteurs, cela signifie que toute tentative de modification d’un produit sera immédiatement détectée et pourra être évitée avant d’arriver au distributeur.
Côté distributeur, si un produit erroné arrive par erreur dans les rayons, il pourra être facilement identifié et retiré. Avec la blockchain cela pourra être immédiat, évitant ainsi de coûteux retraits de lots entiers quand seuls quelques produits sont incriminés.
Enfin, pour le consommateur, la blockchain offre de la transparence et peut créer les éléments de réassurance nécessaires pour être certains qu’une étiquette “dit vrai”. Il sera ainsi possible pour chaque consommateur d’identifier les aliments de la meilleure qualité selon ses propres critères.
Par ailleurs, les usages se multiplient notamment dans les échanges de données.
Production : Les contrats d’assurance grêle avec indemnités automatiquement versées
Lorsque survient un sinistre, l’assuré souhaite pouvoir le signaler de façon simple et être ensuite rapidement indemnisé afin d’entreprendre sans tarder les travaux nécessaires. De son côté, l’assureur souhaite avant tout minimiser les frais occasionnés : traitement de la déclaration, vérification de son bien-fondé, gestion des éventuels litiges… et, bien sûr, ne rembourser que les victimes légitimes en évitant la fraude. En cas d’évènement de grande ampleur, comme une catastrophe naturelle, il lui serait notamment très utile de pouvoir filtrer intelligemment les cas ne présentant aucune ambiguïté, de manière à pouvoir focaliser ses ressources sur les situations plus délicates.
Assuré et assureur n’ont par conséquent pas les mêmes priorités, mais l’un et l’autre se retrouvent sur la nécessité d’automatiser au maximum le traitement du dossier. Ce possible terrain d’entente entre deux acteurs aux intérêts distincts mais pas forcément irréconciliables constitue une opportunité exemplaire d’utilisation des technologies blockchain. Ces dernières attestent plus rapidement et plus sûrement qu’un courrier recommandé de la bonne transmission d’une information dont l’intégrité est en outre garantie.
Pour valider la pertinence de la blockchain dans ce contexte, Atos a développé un démonstrateur de smart contract appliqué aux assurances couvrant les viticulteurs contre les dégâts du gel.
Le principe est d’inscrire dans le smart contract les termes du contrat de manière à ce qu’il puisse se déclencher automatiquement sitôt les conditions de l’indemnisation remplies. En l’occurrence, les paramètres sont ici très simples : il s’agit seulement d’apporter la preuve qu’il a gelé dans une parcelle couverte par le contrat. Pour cela, est associée au smart contract une application mobile. Se connectant avec son identifiant, qui est aussi sa clé publique, l’assuré peut envoyer à son assureur une photo, géolocalisée et horodatée, des vignes touchées. La preuve est irréfutable, le constat immédiat et le déclenchement du règlement s’ensuit automatiquement.
Toutefois, l’intégrité de l’information ne suffit pas toujours. En cas de doute (par exemple, si la photo n’était pas assez explicite), les deux parties doivent avoir convenu des moyens de lever l’incertitude. Dans le cas présent, on fera appel à un oracle, c’est-à-dire une source d’information tierce dont chacun reconnaît la sincérité et l’exactitude des informations. Ce sera Météo France, autorité indépendante qui pourra confirmer de l’épisode de gel sur la parcelle concernée.
Cette disposition illustre parfaitement la notion de gouvernance qui doit entourer une application reposant sur la blockchain.
Distribution : Les poulets Label Rouge à la réalité augmentée
Le distributeur CARREFOUR a débuté l’utilisation de la technologie blockchain pour donner à ses clients un maximum d’informations sur les produits de ses « filières qualité ».
Le poulet fermier d’Auvergne élevé en plein air et sans traitement antibiotique, dont il se vend 1 million d’unités chaque année est le premier à en bénéficier. Un QR code figure désormais sur l’emballage à côté du traditionnel code-barres. Le client qui le scannera pourra lire sur son écran la date de péremption, mais aussi des données qui ne figurent pas sur l’étiquette. On apprend ainsi la date de naissance du poussin et l’identité de son couvoir, la durée de son élevage (81 jours par exemple), le nom et la localisation de l’éleveur, la certification (Label rouge en l’occurrence), le contenu de son alimentation (sans OGM, 100 % de végétaux français, etc.), ainsi que son lieu d’abattage. Une courte vidéo complète cette étiquette à la réalité et montre l’éleveur en chair et en os au milieu de ses poulets en plein air dans l’Allier. Pour Carrefour, c’est le producteur qui renseigne la blockchain, le plus souvent avec un simple smartphone.
Lexique du monde des blockchains
Application distribuée décentralisée (Dapps) : il s’agit d’une application qui s’exécute sur les multiples noeuds d’un réseau. Les smart contracts en sont un exemple.
Blockchain privée/blockchain publique : à la différence d’une blockchain publique comme Bitcoin, ouverte et anonyme, une blockchain privée s’appuie sur un nombre réduit de noeuds identifiés (les membres d’un consortium, par exemple). Cette forme d’extranet sécurisé dénature d’une certaine façon le concept originel puisque la confiance ne procède plus uniquement de l’effet de réseau mais repose aussi en partie sur la gouvernance du système. Une blockchain privée présente en revanche des avantages en termes de confidentialité des données et de performances.
ICO (Initial Coin Offering) : au démarrage d’un service fonctionnant avec des jetons virtuels, une certaine quantité est créée et vendue au public. Ceci permet à l’opérateur de lever des fonds (réels) pour le développement de son entreprise, les utilisateurs/investisseurs espérant quant à eux que leurs jetons s’apprécieront au gré de la réussite du projet.
Smart contract : ou contrat intelligent ,il s’agit de programmes autonomes qui, une fois démarrés, exécutent automatiquement des conditions définies au préalable.
Oracle : donnée tierce susceptible de décider de l’exécution d’un smart contract et dont les parties reconnaissent la fiabilité (par exemple, Météo France pour les précipitations).
Crédit Illustration :
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http://blogs.sciences-po.fr/prospectibles/tag/blockchain/
Sources :
« Petit traité de blockchain à l’usage des honnête gens » La MYNE
https://www.maddyness.com/2017/08/30/foodtech-blockchain-impact-industrie-alimentaire/
https://www.frenchweb.fr/quest-ce-que-la-blockchain/237579
https://blockchainfrance.net/2016/03/04/comprendre-ethereum/
https://start.lesechos.fr/actu-entreprises/finance-banque-assurance/comprendre-enfin-la-blockchain-en-5-points-3638.php?sL6hbYDgtcaZqOPh.99
« La blockchain dans le monde agricole : quels usages pour quels bénéfices ? Vers l’agriculture de confiance » Live de l’Acta – les instituts techniques agricoles Dépôt légal 1er semestre 2018